Depuis le VIIème siècle avant JC, des millions de types de monnaies ont été frappés. La plupart de ces pièces n'ont pas été signées par leurs auteurs. Pourtant, cette pratique qui consiste à signer une monnaie de son nom, de la même manière qu'un grand maître de la peinture signerait un tableau, a été pratiquée très tôt par les graveurs de monnaies grecques. Naturellement, c'est la qualité exceptionnelle du travail de ces graveurs qui leur a donné la possibilité de signer leurs oeuvres. Nous donnons ici un bref aperçu de cette pratique et quelques exemples de monnaies grecques signées par leurs auteurs.

Les signatures relevées sur les médailles grecques de la plus belle époque nous permettent de soulever un coin du voile de la vie si obscure des graveurs, en nous montrant les plus renommés d'entre eux concourant à l'envi pour les mêmes sujets, comme si un thème officiel leur eût été imposé d'avance pour une exposition publique; ou bien, appelés, parfois loin de leur patrie, par des villes diverses qui se disputent leur talent et sollicitent leur burin. De Syracuse, par exemple, Evenète passe à Catane, à Camarina, à Rhégium; Proclès travaille pour Catane et Naxos; Aristoxène pour Métaponte et Héraclée; parfois même, deux artistes collaborent à la gravure d'une même pièce. Bref, en rapprochant, dans nos médaillers, ces joyaux sans prix, qui portent les noms des Cimon, des Evenète, des Eucleidas, des Eumènes, des Phrygille, des Exakestidas et de trente autres, il nous est loisible de comparer et discuter leur manière, leur style, leur mérite réciproque, en un mot, comme nous jugeons les oeuvres que nos artistes contemporains exposent dans les salons.

Quelques exemples de monnaies grecques signées

Exemple de monnaie grecque signée : tétradrachme de Syracuse signé Phrygillos et Euarchidas

SICILE, Syracuse. Deuxième Democratie. 466-405 av. JC. AR Tetradrachm (17.24 g, 8h). Coins signés par Phrygillos and Euarchidas. Frappé vers 415-405 BC. Estimation : $2000. Vendue 4500 USD le 12 septembre 2700 (CNG, Mail Bid Sale 76)

Partout, les dieux et les héros grecs vivent et s'agitent en des milliers d'épisodes. En Crète, par exemple, où une cinquantaine de villes frappent monnaie, c'est la naisance de Zeus dans la grotte du mont Ida; Minos, Thésée, le labyrinthe, le Minotaure; Artémis Dictynne, Cydon allaité par une chienne; le monstre marin Itanus, le géant Talus, les mythes d'Hermès, d'Europe, d'Héraclès.

Exemple de représentation mythologique sur une monnaie grecque : portrait du Dieu fleuve Achelous sur un statère d'Akanania

 

Statère d'Akarnania, vers 229-168 avant JC, au nom du magistrat Lykourgos. L'avers de la pièce montre le Dieu fleuve Achelous (photo CNG).

Statère d'Akarnania, vers 229-168 avant JC, au nom du magistrat Lykourgos. L'avers de la pièce montre le Dieu fleuve Achelous (photo CNG).

 

Les monnaies de la Thessalie interprètent les légendes de Poséidon Onchestius, de Zeus Acreaus, de Phrixus et d'Hellé, de Philoctète, de Protésilas, de Machaon, de Jason, de la nymphe Larissa. Celles de la Thrace nous montrent le grand dieu Kursa et le héros cavalier qui rappellent le culte des ancêtres. En Béotie, nous trouvons l'Héraclès Thébain, l'Hermès criophore à Tanagra, les Niobides à Orchomène; en Argolide, c'est Héra et ses symboles, ou Diomède, ou Apollon Lycien, ou le combat de Danaus et de Gélanor pour la domination du Péloponèse, ou encore la touchante histoire de Cléobis et Biton traînant eux-mêmes le chariot sur lequel leur pieuse mère est assise pour se rendre au temple de Héra. En Arcadie, c'est Ulysse, armé d'un aviron, qui cherche l'homme mystérieux que lui a désigné le devin Tirésia, ou le jeune Arcas avec sa mère Callisté, ou encore Actéon enchaîné. A Aenea de Macédoine, c'est Enée le fondateur mythique de la ville, fuyant l'incendie de Troie avec sa famille. A Egine, c'est Eaque, le sombre juge des morts; à Athènes, la dispute d'Athéna et de Poseidon pour la fondation de la capitale de l'Attique. A Messana, c'est Pheraemon, fils d'Eole, roi mythique de la Sicile.

A Syracuse, c'est la nymphe de la fontaine d'Ortygie qui a si divinement inspiré à la fois les poètes et les graveurs des coins monétaires. A Néapolis, à Térina, ce sont les sirènes Parthénope et Ligée; à Tarente, c'est le jeune Taras sauvé par un dauphin et le cavalier dont les attitudes si ingénieusement variées ne lasseront jamais l'admiration; à Crotone, c'est le chasseur Aesarus sur le bord du fleuve où il devait se noyer et auquel il donna son nom; à Métaponte, c'est l'Achélous personnifié, ou bien l'épi, symbole de la fameuse gerbe d'or dédiée par les habitants au sanctuaire de Delphes; à Carthage, c'est Tanit identifiée à Perséphone. Citerons-nous enfin, à une autre extrêmité du monde grec, le géant Ascus à Damas, les Tables ambrosiennes à Tyr, Astarté à Sidon, Baal-Kaivan à Hiérapolis, Elegabal à Emèse et tout le panthéon des dieux syriens, aux formes si étranges, au culte si monstrueux.

N'est-il pas curieux de retrouver en images, sur les monnaies d'Abonotichus (Ionopolis) en Paphlagonie, le culte gnostique du serpent à tête humaine qu'un imposteur du Iième siècle, Alexandre, avait réussi à introniser dans cette contrée ? On se souvient des persécutions sanglantes que les rois de Syrie, surtout Antiochus IV Epiphane, firent endurer aux juifs réfractaires, et les déportations qui s'envuirirent. Des familles juives furent ainsi transplantées jusqu'à Apamée en Phrygie; elles finirent par s'accomoder de cet exil où elles prosprérèrent tant et si bien que trois cents ans plus tard, au temps de Septime Sévère, elles y avaient acclimaté les traditions blibliques elles-mêmes; on racontait que l'arche de Noé s'était arrêtée au plus haut sommet des montagnes voisines, et, pour que personne n'en put douter, des monnaies furent alors frappées, sur lesquelles on voit Noé et sa femme dans l'arche, et donnant à la colombe son libre essor.

Parfois, nous trouvons sur les monnaies des allégories telles que le Démos, le Sénat, la Démocratie, l'Hégémonie, les fontaines Calléon à Smyrne, Pirène à Corinthe, Euryméduse à Sélinonte, les monts Maemus et Rhodope et le fleuve Ister à Nicololis en Moesie, l'Hellas à Phères de Thessalie; sous l'empire romain, la moitié des types monétaires sont des personnifications allégoriques : Pietas, Justicia, Fecunditas, Aequitas, Concordia, Pax, Libertas, Moneta, Aeternitas, Genius Populi Romani, Gallia, Hispania, Africa, etc.

 

Autres pages sur la mythologie grecque et romaine

Images et noms grecs et romains des Dieux de l'Olympe

Acheter des monnaies grecques antiques

Les dieux romains en photos

Le champ de la numismatique grecque et romaine est immense sur un plan chronologique et géographique. Immense aussi le nombre des matérieux dont elle dispose; infinie, la variété des produits qu'elle cultive sur cette vaste étendue. La comparaison qu'on pourrait être tenté détablir, à ce point de vue, entre le monnayage moderne et celui des anciens, manquerait tout à fait de justesse. Nos monnaies contemporaines sont fixées pour une longue période d'années dans des types de convention qui ne changent guère; les mêmes emblèmes et les mêmes légendes se perpétuent aussi longtemps que dure un système monétaire ou un régime politique : on modifie seulement le millésime et les « différents », tels que les lettres ou les symboles de graveurs et d'entrepreneurs ou marques d'émissions. Tout autres étaient les usages de l'antiquité qui, presque partout, a fait de sa monnaie, non seulement un instrument pour les échanges, mais en même temps une, une médaille commémorative. De là, dans les coins monétaires, une prodigieuse variété de types qui s'accroît encore par la multiplicité des ateliers et par l'imperfection matérielle de l'outillage qui ne permettait pas de frapper un grand nombre de pièces avec les mêmes matrices.

Il est d'usage de partager en deux grands groupes les produits monétaires de l'antiquité : les monnaies grecques et les monnaies romaines. Dans la série grecque on englobe ordinairement toutes les pièces qui ne sont pas de coin romain, et ce n'est pas sans quelques bonnes raisons, car grâce aux colonies que les Grecs avaient, de bonne heure, disséminées sur toutes les côtes méditerranéennes, l'influence hellénique s'est fait sentir dans le monnayage du monde entier, aussi bien, par exemple, en Gaule, en Espagne, en afrique, qu'aux bouches du Tamaïs, au pied du Caucase ou sur les rives de l'Indus. On appelle donc « grecque » toute la numismatique antique qui n'est pas proprement romaine.

Dans son "Traité des monnaies grecques et romaines", paru en 1907, E. Babelon évoque les principales découvertes de monnaies grecques archaïques faites en Occident. Il présente rapidement les principaux trésors et dépôts de monnaies connus à son époque, après avoir exposé quelques notions préliminaire sur le monnayage grec primitif d'Occident. Parmi les dépôts de monnaies et trésors cités, il évoque le trésor d'Auriol, dont la découverte fit sensation à l'époque, mais aussi les trouvailles de Saint-Rémi de Provence, de Cavaillon, ainsi que celles de Volterra et de Vélia en Italie, mais encore les trésors de Pont de Molins, près de Figueras (Espagne), de Morella (Valence, Espagne) et les trouvrailles de Rosas et d'Ampurias (Espagne). Ce parcours numismatique le long des côtes de la Méditerranée Occidentale a quelque chose de fascinant : on imagine ces colons grecs, déjà très civilisés, installant leurs comptoirs commerciaux sur des rivages vierges et commerçant avec les pleuplades encore primitives de l'arrière-pays...

Les artistes de la Grèce antique ont créé des monnaies extraordinaires, dont l'exceptionnel pouvoir de séduction reste intact après 25 siècles. Cependant, collectionner ces monnaies n'est pas simple : pour s'y retrouver il faut quelques connaissances historiques et géographiques. Pour commencer, nous nous proposons d'expliquer sommairement les caractères géographiques, historiques et artistiques des plus anciennes monnaies grecques, c'est-à-dire les monnaies d'Asie Mineure émises entre le VIIème et le début Vème siècle avant notre ère.

Les Grecs, qui s'appelaient eux-mêmes les Héllènes, ont peuplé les rivages et les nombreuses îles de la Méditerranée nord-orientale. La Grèce continentale est constituée par la partie inférieure de la péninsule des Balkans, dont l'extrémité sud s'arrête avec la presqu'île du Péloponnèse. A l'Est, la Mer Egée sépare la Grèce continentale des territoires grecs de l'Asie Mineure (Turquie actuelle - voir carte); à l'ouest, c'est la mer Ionienne qui sépare le Péloponnèse de la Sicile et de l'Italie du sud. C'est sur les côtes d'Asie Mineure que les premières monnaies ont été inventées, avant de se répandre dans l'ensemble du monde grec.


Image de dauphin sur une monnaie grecque de Tarente


Image de dauphin sur une monnaie grecque de Tarente

Description complète de la monnaie :


CALABRE, Tarente. Vers 490-480 avant JC. AR Nomos (7.97 grammes, 9h). Avers : Phalanthos astride dauphin à droite, étendant sa main et tenant un couteau. Revers : Hippocampe à droite. Références de la monnaie : Fischer-Bossert 51 (V23/R40); Vlasto 123 (same dies); HN Italy 827; SNG France 1580 (same obv. die).
Origines de la monnaie : Classical Numismatic Group
Vente de monnaies sur Internet n°79
Date de la vente aux enchères : 17 septembre 2008
Numéro du lot : 11
Prix d'estimation de la monnaie : 750 Dollars US
Prix réalisé : 875 dollars US. Note : les prix n'incluent pas les frais de vente